« je les ai perdu avant que vous n’arriviez, assura-t-elle en passant devant lui. Et puis, je ne pense pas qu’ils aient pu glisser jusqu’à la cuisine. »

Mila s’avança dans la pièce principale :

« Au départ quand j’étais sur votre canapé, je les ai retiré et je les ai posé sur le sol avec vos clefs, mais quand je me suis levée, mon pied s’est pris devant et mes bijoux ont volés dans tout les sens. »

Enfin à peu de choses près, ça ne s’était pas exactement passé comme ça. Mila boita jusqu’à la table près du clic-clac. Elle s’accroupit et jeta un coup d’œil, mais pas de bijoux en vue. La jeune femme tomba doucement sur les genoux et regarda autour d’elle. La pièce était plus éclairée qu’au soir dernier. Elle avait maintenant davantage de chance de retrouver ses affaires.

Mila avança sur les genoux jusqu’au canapé, puis elle colla son visage au sol. Son sourire s’étira lorsqu’elle remarqua son second bracelet tout au fond. La jeune femme glissa tout entière sous le meuble. Contente d’avoir retrouver son bien, elle s’apprêtait à prévenir Léon, mais son élan fut coupé rapidement. Le chasseur de prime s’approchait dangereusement du fauteuil où elle avait dormi. Le livre jaune gisait toujours en dessous.

« Non ! il n’y a rien en dessous … Je le vois d’ici. »

Elle ressortit rapidement, puis balaya la poussière de ses vêtements et de ses jambes avec le revers de sa main.

« C’est bon, j’ai l’autre. » Annonça-t-elle en relevant ses manches aux trois quarts et en enfilant les bijoux jumeaux à leur poignet respectif.

Finalement, il était risqué de le laisser chercher avec elle, Mila décida de s’occuper ses boucles-d’oreilles plus tard. Elle s’assit en tailleur sur le lit. Lorsqu’il prononça le mot « bouquin », ses yeux ne purent s’empêcher de faire un rapide aller-retour vers le fauteuil. Un peu gênée, elle sourit.

« Pourquoi vous excuser, vous aviez à faire ce vous deviez faire … C’est déjà sympa de m’héberger, je pouvais bien attendre en contre parti. Et puis, un livre ne vous sert à rien si vous ne savez pas lire. »

Enfin si, à écraser un cafard en flammes. Bientôt le silence retomba. Mila joua à faire tinter ses bracelets jusqu’à ce que Léon lui demande comment elle les avait eu. la jeune femme avala sa salive.

C’était dans ses débuts, elle était entrée chez les négriers, il y avait tout juste deux mois. Elle ne connaissait pas encore toutes les ficelles du métier. Un jour, un de ses collègues lui proposa de faire une descente et de se partager la marchandise. C’était à ce moment là qu’elle avait connu Simon, imperturbable alcoolique, mais qui était rester un ami fidèle jusqu’à sa mort. Il était, à cette époque, encore un électron libre et travaillait avec qui voulait.

Les trois négriers attaquèrent un petit groupe de nomades. Tous capturés et munis d’un collier, les esclavagistes procédèrent à la fouille des brahmines. Mila trouva un petit coffret rempli de bijoux en or, seuls les bracelets l’intéressaient. Malheureusement, le type qui lui avait proposé cette association temporaire, possédait une esclave qui se croyait l’égale de Mila, et qui les désiraient autant qu’elle. La négrière a eu beau l’envoyer chier, celle-ci récupéra le coffret grâce à l’intervention de son maître qui prenait grand soin de cette moins que rien. La jeune femme rousse les haïssait. Voir cette esclave parée de ce qui était techniquement à elle la mettait en rage.

Avant de repartir pour l’arc, Mila profita d’un moment d’inattention du chef de l’opération, pour l’assommer. Lorsque celui se réveilla, il était ligoté sur une chaise. Il somma Simon de le détacher. Ce dernier était assis sur une pierre, à l’ombre et fumait une cigarette. Il ne fit rien et déclara qu’il voulait voir ce que sa collègue avait prévu de faire. Bientôt, Mila apparut devant le prisonnier, les bracelets en or à son poignet droit. Elle lui déclara en montrant une hachette pleine de sang : « Rose a montré une certaine résistance, j’ai dû coupé. » Elle affichait un sourire ravi et rempli de cruauté.

Sous les insultes du bonhomme, la gamine de 18 ans amena, devant lui, l’esclave qui pleurait et dont une main manquait. Mila lui tira une balle dans chaque mollet, ainsi elle restait à genoux. La négrière l’imbiba d’alcool et craqua une allumette. Bien entendu, elle se permit de jouer avec les nerfs des deux pauvres victimes avant de brûler la fille. Des cris à en déchirer le silence s’élevèrent. Mila soupira et alla s’asseoir près de l’homme ligoté. « Heureusement que je ne lui ai pas laissé ces deux bracelets, ils auraient fondu … N’es-tu pas d’accord avec moi ? J’ai eu raison de les prendre. » Elle se mit à rire.

Les trois négriers attendirent que le corps ait cessé de crier et soit tombé inerte sur le sol. Le bonhomme était anéanti. Il aimait son esclave. Mila se leva. Elle en avait déjà assez et avait envie de rentrer, alors pour en finir vite, elle tira une balle dans le crâne du négrier. Et voilà ! C’était ça l’histoire de ses bracelets.

« Et bien … Disons que c’est une histoire d’amour qui a mal fini, le gars en question qui m’a offert ça, n’a pas été très correct, alors je suis partie sans me retourner, je suppose que ça devrait me le rappeler, mais en fait non et puis je les aime bien … C’est de l’or, il paraît qu’avant ça avait une valeur marchande. »

Mila s’étira. Il fallait changer de sujet.

« Bon à moi de vous posez une question … »

La jeune femme se leva et alla voir du côté du fauteuil en cuir. Son regard parcouru le sol, puis elle se baissa pour attraper la petite voiture. Elle revint sur le lit et s’allongea sur le ventre près de Léon.

« J’ai trouvé ça sous l’armoire, hier, quand j’ai trébuché dans vos clefs. » Dit-elle en tendant le jouet au bonhomme.

Mila sourit.

« Je m’en doutais. » Mentit-elle.

En réalité, que se soit un souvenir d’enfance ou autre chose, cela n’avait aucune importance, c’était juste pour qu’il se focalise sur autre chose que sur ses éventuelles fausses expériences de vie. Pour le coup, c’était réussi, Léon semblait complètement perdu dans ses pensées. Le jouet avait peut-être plus de poids sentimental qu’il le prétendait, et il n’avait pas particulièrement envie d’en parler. Au moins, ils étaient deux à vouloir ne pas dévoiler leur passé. Lui, en contournant la difficulté avec quelques phrases vagues, et elle, en mentant comme un arracheur de dent.

Elle tourna sur le dos et soupira. D’abord elle observa le plafond et suivit du regard les veines que formait la peinture craquelée. Puis, la jeune femme laissa sa tête tomber dans le vide. Elle regarda le monde à l’envers pendant un moment avant de jeter un coup d’œil vers Léon. Vu son expression, il devait être vraiment ailleurs.

Mila se redressa et soupira. Sans attendre, elle se plaça derrière lui et plaqua ses mains sur ses yeux, moyen radical pour le réveiller.

« Il semblerait que votre enfance lointaine et oubliée vous soit quelque peu perturbante … Donnez-moi ça ! »

La jeune femme lui arracha la petite voiture rouge des mains et la lança par-dessus son épaule. Des rebonds métalliques se firent entendre.

« Maintenant que les mauvais souvenirs se sont envolés, pensez ou parler d’autre chose, ou faites ce dont vous avez envie … Et désolée, si ma question vous a dérangée. »

Mila se détacha de Léon et s’assit en tailleur de manière à lui tourner le dos. Elle observait les moulures du plafond lorsque le chasseur de prime lui demanda plus de précisions. Toujours les yeux levés vers le ciel, elle soupira.

« Bah … Je sais pas, je suis pas dans votre tête. J’ai dit ça pour que vous arrêtiez de faire votre gueule de raie. Maintenant, si vous avez effectivement une envie quelconque, assouvissez-la et voilà, c’est tout, que voulez-vous que je vous dise ! »

Bientôt son cou devint douloureux. La jeune femme chavira d’abord sur le côté, puis roula sur dos, une position plus confortable pour regarder le décor du plafond. Mila ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil vers Léon. Elle n’apprécia pas particulièrement l’expression qu’il affichait. Au moins, il n’avait plus une gueule de raie, mais Mila la regretta rapidement face à cette tête de vieux satyre.

« Quoi ? » demanda-t-elle suspicieuse.

Mila remarqua la déception de Léon lorsque celui-ci se dirigea vers la cuisine. Elle se contenta de lever les yeux au ciel. Bientôt, il entama une explication sur son comportement envers les femmes, prétendant être au-dessus de la masse.

« Tss … Va demander ça à tous les salauds qui me sont passés dessus … » Laissa-t-elle échapper à mi-voix.

Et puis Mila ne croyait rien du tout, la seule chose qu’elle avait ressentie, c’était une douleur insupportable entre les jambes. Ensuite, Léon revint et lui assura qu’il ne la toucherait pas sans son approbation. La jeune femme ne put s’empêcher de lui adresser rapide un regard méprisant avant de fixer à nouveau le plafond. De belles paroles que n’importe quelle femme aimerait entendre dans les terres désolées. Mila avait bien du mal à y croire, elles semblaient sonner fausses.

Pourtant la jeune femme dut reconnaître qu’il ne l’avait ni frappée, ni attachée, ni insultée. Puis, il l’avait aidé alors que beaucoup de gens ne l’aurait pas fait sans quelque chose en retour, et de son côté, elle n’était finalement qu’une ingrate, qui n’avait fait que mentir et dire des choses auxquelles elle ne croyait pas.

« Léon ! dit-elle en se redressant … Prouve-le moi. »

Mila glissa vers lui.

« Montre-moi ce que tu prétends être. La jeune femme agrippa tee-shirt du bonhomme, et ajouta en le regardant droit dans les yeux. Par contre, je te promets que si tu me malmènes, je te brûlerai vif. »

Toute trace d’hypocrisie avait disparu de son visage. Pourtant, Mila était très sérieuse en ce qui concernait la menace. Elle savait très bien qu’elle en serait capable sans s’encombrer de remords. La jeune femme ne lui pardonnerait pas de s’être joué d’elle. Il lui avait répondu par un simple sourire accompagné d’une larme. Mila n’eut pas le temps de se poser de questions, qu’il l’embrassait déjà. Sa bouche resta inerte un instant, avant de se prendre réellement au jeu. Puis, elle sentit les mains de Léon se faufiler sous sa chemise et la retirer.

Mila l’imita. Ses doigts hésitèrent avant de descendre le long du tee-shirt. Arrivés au bord, ils glissèrent dessous et montèrent le vêtement en caressant les côtes de Léon. Rapidement, La jeune femme laissa la relève au bonhomme qui se chargea de l’enlever. Elle recula vers le centre du lit et le regarda se déshabiller. Par la même occasion, Mila se permit de l’observer avec un sourire en coin. Il était relativement bien conservé, malgré quelques cicatrices. Bientôt il la rejoignit et la jeune femme n’eut rapidement plus de bas, elle non plus.

Mila ne pensait plus à rien d’autre qu’au plaisir qu’elle ressentait et, étonnement, à celui qu’elle pouvait lui procurer. D’une nature relativement égoïste habituellement, elle aurait seulement apprécié la sensation agréable et excitante que les doigts, les lèvres, la langue de Léon exerçaient sur sa peau, mais, pour une fois, la jeune femme se préoccupa réellement du bien-être de quelqu’un, en l’occurrence, de satisfaire son partenaire.

Pour sa part, Mila agrippa son cou et y déposant de nombreux baisers avant de s’attarder sur le lobe de son oreille droite. Ses mains parcoururent les formes de ses muscles, effleurant les zones sensibles. Sa bouche descendit le long de la gorge, puis du thorax en suivant la ligne qui le séparait. Elle s’arrêta longuement sur les mamelons, avant que ses doigts ne s’aventurent sous la ceinture. Ils caressèrent doucement son sexe et osèrent s’égarer un peu plus loin, jusqu’à ce que le couple décide de passer aux choses sérieuses …

Malgré l’application de Léon, Mila ne put s’empêcher d’envisager la naissance d’une vive douleur avant de l’oublier complètement au fur et à mesure qu’il s’activait en elle. Et au final, dans l’immédiat, ce fut un vide qu’elle ressentit entre les cuisses lorsqu’il se retira. Machinalement, ses genoux et ses pieds se rapprochèrent les uns des autres.

Elle se redressa et s’assit en tailleur tournant le dos à Léon. En regardant l’impact éclatant du soleil sur le plancher, Mila réalisa qu’elle n’avait pas vu le temps passé avec lui, mais toute comparaison de cette fois là avec toutes ses expériences sexuelles précédentes, n’avait pas lieu d’être. Il était évident que cette femme préférait être entre les mains de Léon que celles de « poil de bleuet » ou autres psychotiques et négriers. Mila se dit qu’elle avait vraiment eu de la chance de n’avoir pas fini chez Adam, car non seulement il l’aurait violée mais aussi il se serait permis de la taillader à coup de sabre. À cette image, la jeune femme toucha le bout d’une des cicatrices que ses doigts pouvaient atteindre en passant par dessus l’épaule.

Mila tourna légèrement la tête vers la droite se forçant à repousser ces souvenirs amers. Ses yeux tombèrent sur les genoux de Léon puis remontèrent jusqu’à sa tête. Un sourire sincère se dessina sur son visage lorsqu’elle croisa son regard. La jeune femme avança vers lui à quatre pattes, puis s’allongea à plat ventre le long de son corps. Enfin, elle appuya sa mâchoire sur les mains et observa le bonhomme.

« Bon admettons … Tu t’en es bien sorti, et comme ça m’a rendue d’humeur magnanime, je ne te brûlerai pas. » Plaisantait-elle presque.

Mila avait certes trouvé que faire l’amour était particulièrement jouissif, néanmoins cela ne changeait pas le fait qu’elle était un beau cadeau empoisonné qui trouvait de la délectation dans la souffrance des autres.

« Euh … Ouais … Les deux tant qu’à faire. »

Ah vrai dire, Mila n’avait pas mangé depuis hier soir, alors son ventre commençait effectivement à crier famine.

« Je me contenterai de ce que tu feras. »

Elle regarda Léon s’éloigner et se retrouva rapidement seule sur le lit. Sa tête se tourna vers ses vêtements. La jeune femme n’avait franchement pas envie de les enfiler. Elle aurait préféré encore rester un peu à l’état de légume, allongée sur le chasseur de prime, se permettant d’oublier le monde.

Mila glissa vers le bord du lit en soupirant et commença à s’habiller. Puis, elle entra dans la cuisine, terminant de boutonner sa chemise. La jeune femme contourna Léon en passant la main sur ses reins et observa ce qu’il faisait. Un paquet posé en face d’elle l’intrigua rapidement. Il contenait des tortillons jaunes, oranges et verts. Mila s’en empara d’un et le regarda sous toutes les coutures.

« C’est mangeable ça ?, demanda-t-elle en levant les yeux vers le bonhomme. Quoi ? Mes connaissances en cuisine se limitent à faire cuire de la viande, tu sais. »

« C’est ça, fous-toi de ma gueule. » Rétorqua-t-elle avec un sourire.

Mila s'assit sur une chaise et observa les mouvements de Léon jusqu’à ce que celui-ci lui tende son assiette. Le fait que ce soit les Italiens ou une autre nationalité qui ait inventé les pâtes lui passait complètement au-dessus de la tête. Elle ne prêta pas plus d’attention que ça à ses paroles et le gratifia d’un simple merci. Mila fixa son écuelle avant de décider de manger ses pâtes en commençant par les vertes. Cette couleur ne s’accordait pas avec les deux autres.

Mila trouva que sa nourriture n’avait pas de goût, mais, au moins son estomac était rempli. Elle entamait les jaunes lorsque Léon lui demanda certaines précisions. La jeune femme jeta un coup d’œil dans sa direction. Pour sa blessure, elle n’avait pas de raison de mentir.

« Il pleuvait alors je me suis réfugiée dans un immeuble. Manque de bol, il y avait aussi un croisé et d’autres … Choses. Je ne saurais même pas te dire ce que c’était, ça se tortillait, ça cavalait, enfin bon ce n’était pas très beau à voir. Ça nous a attaqué, je me suis enfuie de mon côté, sauf que l’une de ces saloperie m’a coursé dans la rue. Finalement, je l’ai tué, mais il m’a griffé en essayant de m’attraper, et après tu connais la suite. »

Enfin, elle entama les oranges.

« Comment ça d’où je viens ? Tu ne vas pas me faire croire que ma vie t’intéresse, surtout qu’elle est loin d’être glorieuse et exemplaire. Tu regretterais même de l’avoir entendu. Et arrête de me vouvoyer, je n’aime pas. » Ajouta-t-elle en buvant une gorgée de son whisky.

Mila haussa simplement les épaules lorsque Léon lui conseilla de changer d’arme. Jusqu’à maintenant elle ne lui avait pas causé de tort, et puis la jeune femme avait pris ce qui se présentait à l’orphelinat.

À son grand désarroi, Mila constata qu’il n’en avait pas fini avec ses questions. Le pire était qu’elles pointaient toujours son passé du doigt même si ça restait formulé indirectement. Elle soupira et répondit tout de même :

« Depuis quelques jours je n’ai plus de chez moi, donc où aller j’en sais rien, et quoi faire de ma vie, je n’en ai aucune idée non plus. »

Elle se redressa lentement sur sa chaise, un sourire indéchiffrable aux lèvres.

« Tu vois, pour plein de gens, leur vie a volé en éclats parce que des négriers, des psychotiques, ou même des mercenaires sont passés par là, et bien moi, je n’ai pas eu besoin de tout ça, je l’ai foutu en l’air moi-même … Donc disons que, là je dois en recommencer une ... ou plutôt retourner à celle que j’avais plus jeune. »

« C’est gentil, mais je ne vais pas t’embêter, je resterai le temps que m’a prescrit le médecin ou je partirai avant. »

Et surtout qu’elle n’aimait pas rester enfermée comme ça, sans rien pouvoir faire. Puis Mila finit son verre par petites gorgées. Elle resta un peu perplexe lorsque Léon lui parla de sa théorie du but que chacun s’est fixé dans la vie. Pour sa part, elle n’en avait pas, ou plus, exactement, car il avait été balayé en quelques coups de sabre et elle n'en envisageait pas de nouveau.

« T’as pas à être désolé pour moi, j’ai simplement merdé au moment propice. » rétorqua-t-elle, une pointe de rage dans la voix et dans le regard.

Rapidement, son visage se radoucit. Mila soupira et croisa les jambes. Puis, elle plaça un coude sur la table et laissa sa tête reposer sur la main.

« Assez parlé de moi ! Et toi, tu cherches quoi ? Et est-ce que t’as trouvé au moins ? »

À priori c’était un sujet délicat, puisqu’il ne lui avait pas précisé ce qu’était cette chose précieuse et qu’apparemment elle avait un gros impact sur sa vie. Mila répondit par un simple « hum ». Elle ne chercha pas à en savoir plus et, à vrai dire, elle était bien incapable de compatir ou de le comprendre. Elle ne savait déjà pas quels sentiments éprouver pour Léon, alors ressentir un attachement quelconque pour quelque chose qui avait disparu lui passait à des kilomètres au-dessus de la tête. Sinon, il n’avait qu’à la remplacer !

Mila se leva et passa dans l’autre pièce. Ses yeux la parcoururent rapidement.

« Ah oui, mes boucles d’oreilles. » Se rappela-t-elle à voix basse.

La jeune femme reproduit le schéma de sa gestuelle, puis regarda à nouveau sous les meubles où elle avait déjà jeté un coup d’œil. Au passage, elle ramassa le jouet et le posa sur la commode. Enfin, Mila remarqua une table dans un coin à l’opposé de la pièce. Elle n’y avait pas fait attention jusqu’à maintenant. Elle s’en approcha en marchant sur les genoux. Sa main passa dessous, et, en effet, les boucles y croupissaient. Mila se redressa et souffla la poussière qui les recouvrait, puis elle les posa sur la table.

La jeune femme se dirigea vers la fenêtre, l’ouvrit et s’assit sur le rebord. Elle observa l’extérieur avec convoitise. Elle resta accoudée à la rambarde un moment. Finalement, Mila brisa le silence :

« Tu m’accompagneras faire un tour quand je pourrai marcher à peu près normalement ? »

Mila tourna automatiquement la tête lorsque sa chemise se souleva et regarda, elle aussi, sa plaie qui était recouverte de croûtes marronnasses. La jeune femme grimaça et préféra retourner à la contemplation de l’extérieur. Elle fut amusée par la réaction de Léon face à sa guérison.

« À vrai dire, je ne le comprends pas moi-même, je n’ai pas eu de parents pour me l’expliquer, et ça fait longtemps que j’ai arrêté de chercher une réponse. »

Mila ramena ses pieds sur le rebord de la fenêtre et posa sa tête sur ses genoux. Elle passa une partie de l’après-midi, assise là, sans dire un seul mot, perdue dans ses pensées et ses souvenirs.

Enfin, elle émergea lorsque sa tête tourna vers l’intérieur de l’appartement. Ses yeux firent le tour et tombèrent sur le livre jaune caché sous le fauteuil. La jeune femme vérifia que Léon était bien occupé à autre chose avant de descendre de son perchoir et se baisser. Elle afficha une mine un peu gênée, lorsqu’elle vit le chat dont le corps avait été un peu carbonisé. Mila le trouva bien étrange, malgré les traces de brûlures, son grand chapeau à plumes, un bout de ses bottes et de sa rapière dépassaient. Intriguée, Mila l’ouvrit. Ce livre était bien différent, beaucoup d’illustrations accompagnaient le texte. Elle regarda les premières images attentivement. Elle voyait passer des princesses, des princes, des animaux qui semblaient tellement inoffensifs et petits. Tous se trouvaient dans des univers verdoyants irréels où se plantaient des villes qui n’étaient pas détruites.

Malheureusement, n’ayant que des images comme base, Mila ne pouvait pas savoir exactement ce que racontait l’ouvrage. Elle finit par le feuilleter cherchant le fameux chat de la couverture.